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Danielle LE BRICQUIR

Danielle LE BRICQUIR expose en France et à l’étranger. Son œuvre figurative et féérique est un hymne à la poésie et s’inspire des légendes celtes, réminiscences de son enfance bretonne
Art et déchirure : une exposition au cœur d’un asile psychiatrique
Installé dans un hôpital en Seine-Maritime, le lieu culturel présente, entre autres, les œuvres d’André Robillard, artiste interné durant une grande partie de sa vie.
Par Harry Bellet (Sotteville-lès-Rouen (Seine-Maritime), envoyé spécial )

L’art brut ou singulier, celui des autodidactes ou des aliénés, est depuis longtemps accueilli par les grands musées. Il est moins fréquent d’aller le voir dans une institution qui en est aussi un des lieux de production, l’asile psychiatrique. C’est ce que propose le Musée Art et déchirure à Sotteville-lès-Rouen (Seine-Maritime), installé dans le pavillon La Roseraie, un bâtiment autrefois réservé aux femmes installé au milieu d’un parc, mis à la disposition du musée par le centre hospitalier du Rouvray.
Les Rouennais connaissent le festival, lui aussi nommé Art et déchirure : en 17 éditions biennales, de 1989 à 2009, le musée les a familiarisés avec cet art autre, cet art insolite. L’épidémie de Covid-19 a signé sa fin, mais les œuvres acquises durant ces années demeurent et forment le fonds du musée – trois cents ou quatre cents pièces à ce jour, l’inventaire est en cours –, complété par une exposition consacrée aux machines guerrières, principalement des fusils en bois, d’André Robillard. Un artiste historique, en quelque sorte. Né en 1931, il a passé presque toute sa vie en hôpital psychiatrique (il y vit toujours), mais fut repéré par le peintre Jean Dubuffet (1901-1985), en 1964, qui l’intégra à sa collection d’art brut, aujourd’hui regroupée à Lausanne (Suisse).
Le musée de Sotteville-lès-Rouen est géré par une association présidée par Joël Delaunay, carrure de rugbyman, autrefois chargé de l’animation au sein de l’hôpital, qui a eu l’idée de sortir des traditions asilaires : « A nos débuts, en 1989, nous avions décidé de montrer les œuvres de malades en les confrontant avec celles d’artistes contemporains qui ne l’étaient pas. Nous voulions ouvrir l’hôpital, ne plus être un ghetto. » En commençant par en sortir : le festival avait lieu, notamment sa programmation théâtrale, hors les murs, en ville. Les acteurs étaient le plus souvent des patients de l’hôpital. « Une charge émotionnelle incroyable », se souvient Joël Delaunay.
L’horreur du vide
Avec le soutien du directeur de l’hôpital, un financement participatif et beaucoup de bonne volonté, le musée s’est ainsi constitué dans un pavillon désaffecté du centre hospitalier. Un bâtiment du XIXe siècle que la modestie des moyens a conduit à laisser largement dans son jus, ce qui permet d’imaginer la vie quotidienne des aliénées qui l’occupèrent. Cela donne également une résonance singulière aux œuvres exposées, d’une nature bien différente de celle que l’on peut ressentir dans un musée classique. Ainsi les œuvres de Robillard, très bien représentées dans la collection de L’Aracine déposée au Lille Métropole Musée d’art moderne de Villeneuve-d’Ascq (Nord), partenaire de l’exposition, prennent une dimension bien plus familière.
« On peut tout se permettre, ici », dit Joël Delaunay. Exposer des œuvres de psychotiques, mais aussi de gens qui ne sont pas malades. « Sauf, précise-t-il, que lorsque je discute avec ceux-là, il y a toujours une faille quelque part. Cette dame qui travaille avec des poupées Barbie m’a confié avoir été victime d’inceste. Celui-là est toxico, celui-ci fait de temps à autre des bouffées délirantes absolument terribles… D’autres sont à peu près stabilisés et mènent une vie normale. Celui-ci, par exemple, a même été invité à enseigner aux étudiants des Beaux-Arts du Havre par son directeur, qui voulait leur montrer un autre regard sur l’art. Cet autre est alcoolique : avec des Cubitainer vides, il a fait un chemin de croix. Pourtant, il est communiste ! » A méditer dans le débat sur l’opportunité de séparer l’œuvre de son créateur…
Il y a toutefois des constantes dans cet art brut. L’une d’entre elles est l’horreur du vide. Dans un dessin, on remplit la feuille. « C’est la même chose que dans les lettres des schizophrènes », remarque Joël Delaunay. Dans une sculpture, on accumule. Certaines sont un fatras incroyable, d’autres sont au contraire classées, rangées avec une rigueur implacable. La même variété se retrouve dans l’accrochage du musée, tantôt minimal, tantôt d’une densité réjouissante. Avec parfois une salle entière réservée à un seul artiste. C’est le cas, par exemple, de Caroline Dahyot, qui a transposé dans une grande pièce un peu de l’esprit de la maison qu’elle habite à Ault (Somme), entièrement couverte de ses peintures.
Reste que, pour l’historien d’art, ces pratiques sont perturbantes. Les grilles d’évaluation classiques sont inopérantes. C’est ce que confirme Joël Delaunay : « Il faut se poser la question : est-ce que c’est beau ? La plupart du temps, non. Est-ce que c’est émouvant ? Oui, toujours. »
« André Robillard », Musée Art et déchirure, centre hospitalier du Rouvray, 4, rue Paul-Eluard, Sotteville-lès-Rouen (Seine-Maritime). mercredi et samedi-dimanche, de 14 heures à 18 heures, jusqu’au 24 septembre.
Harry Bellet (Sotteville-lès-Rouen (Seine-Maritime), envoyé spécial )
Migas CHELSKY

Notice du catalogue du Festival Art et Déchirure 2019 :
MA DÉMARCHE
Je viens du collage et pour cette raison, je me sens bien plus à l’aise à devoir rassembler et ordonner des éléments épars dans une composition esthétique qu’à démarrer un tracé sur une toile immaculée (pratique que j’adopte pourtant avec mes dessins que j’entreprends toujours de manière aléatoire).
J’aime les amoncellements de vieux éléments (objets qui ont vécu ou détritus émouvants), les boîtes à trésors, les greniers, les brocantes, voire les poubelles.
Je suis fasciné par les matières fatiguées, patinées : la ferraille attaquée par la rouille (qui donne des couleurs si extraordinaires !), le bois, le cuir etc.
Quand je réalisais mes photomontages, je puisais dans des piles de revues, des boîtes de photos ou de morceaux de photos classés arbitrairement par thèmes ou par couleurs, des éléments que je tentais de rapprocher pour qu’il se passe quelque chose au niveau du sens et de l’esthétique. Cela se faisait en suivant une idée ou en la recherchant.
Aujourd’hui, je fabrique des maisons délabrées, abandonnées, isolées sur et avec du carton ondulé. J’aime ce matériau pour sa « générosité » : sa matière et ce qu’il m’offre quand il est dénudé, lacéré, froissé, percé… et puis il y a de la dérision dans ce carton !
A côté des maisons, je crée des êtres hybrides avec mes dessins, des personnages grotesques composés de bric et de broc avec mes figurines et mes masques assemblés de matériaux divers.
Je travaille sur des thèmes que j’essaie d’explorer à la frontière de la réalité et de l’imaginaire en adoptant, au départ, des images simples enfantines comme les bonshommes, les maisons, les arbres…







